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Presse enseignante et spécialisée
mardi 4 mai 2010
Sur le site CLIS/IME :
Dans le numéro 48 (avril 2010) de la revue Nouveaux Regards, le directeur de l’Institut de recherches de la FSU, François Bouillon, évoque Je lis, j’écris :
Janine Reichstadt, Jean-Pierre Terrail,, Geneviève Krick, Je lis, j’écris. Un appentissage culturel et moderne de la lecture. Les Lettres bleues.
Je lis, j’écris est un manuel d’apprentissage de la lecture et de l’écriture pour le cours préparatoire (CP). Il est d’un grand intérêt pour les professeurs de l’école élémentaire, car il conjugue, de façon très novatrice, un apprentissage méthodique et sécurisé, et une pédagogie active.
Il propose en outre un mode d’emploi général et des indications techniques précises correspondant à chaque leçon. Il est ainsi également d’un usage aisé et sûr pour toutes les autres utilisations : soutien parental, rééducation et orthophonie, accompagnement scolaire, alphabétisation des adultes, etc.
Je lis, j’écris est une méthode syllabique qui se réclame d’une démarche « graphémique ». L’apprentissage part exclusivement en effet des signes écrits, les « graphèmes », que le jeune lecteur apprend progressivement et méthodiquement à déchiffrer. C’est la fluidité du déchiffrage qui permet l’accès au sens des mots et des phrases, auxquels l’élève est confronté dès la quatrième leçon.
Je lis, j’écris évite ainsi tout départ oral de l’apprentissage, toute « leçon de son », toute forme d’exercice qui invite les élèves à reconnaître la transcription graphique de tel ou tel son, toute « lecture devinette ». La langue écrite en effet a une histoire propre, elle est tout autre chose qu’une matérialisation de la langue parlée. C’est bien de la langue écrite qu’il faut partir si on veut la connaître et la comprendre.
Les textes des différentes leçons tirent selon les cas plutôt vers la description, l’humour, ou le poétique. Ils sont porteurs d’une culture universaliste, respectueuse de l’égalité des genres et des origines nationales. Dès que possible les auteurs ont puisé dans la littérature poétique pour en tirer des textes à la fois accessibles et exigeants, loin de toute infantilisation de l’apprenti lecteur. L’ambition culturelle de Je lis j’écris se mesure aussi à la qualité de la mise en page, de la typographie, et de l’iconographie : l’apprentissage de la lecture se conjugue ici avec une initiation au langage des formes et une confrontation au patrimoine artistique.
François Bouillon
Publié dans le n° 22 de la revue l’École émancipée (avril 2010) :
Du nouveau dans le champ de la lecture ?
Entretien avec les auteurs de Je lis, j’écris.
Janine Reichstadt, Jean-Pierre Terrail et Geneviève Krick viennent de publier Je lis, j’écris. Un apprentissage culturel et moderne de la lecture (Les Lettres bleues, 2009). Un manuel pour le CP hors des sentiers battus. Entretien.
Q : Comment en êtes-vous venus à réaliser cet ouvrage ?
R : Militants de la démocratisation scolaire, nous considérions de longue date problématique l’écart entre notre conviction du « tous capables » et la difficulté persistante, pour l’école, à faire entrer normalement tous ses publics dans la culture écrite. Et à cet égard la question des apprentissages élémentaires nous a toujours paru cruciale. Il se trouve que l’une d’entre nous avait constaté, un peu par hasard d’ailleurs, la grande efficacité de la méthode syllabique avec des enfants en ITEP ou en CMPP qui avaient complètement échoué à l’école. Or si l’on peut guérir, pourquoi ne pas prévenir ? Nous avons dès lors cherché à comprendre les raisons de cette efficacité.
Q : Et qu’est-ce qui vous a convaincus au point de passer à l’acte ?
R : Nous nous en expliquons plus longuement sur le site du manuel (www.leslettresbleues.fr). On peut résumer l’affaire en trois points :
1/ La grande majorité des experts et des collègues sont désormais convaincus, à l’encontre de la globale « pure », que l’apprentissage du code des correspondances entre lettres et sons est incontournable. Or à cet égard la démarche de la syllabique, qui consiste à partir des lettres (plus précisément des graphèmes, façons d’écrire les phonèmes) en apprenant à les déchiffrer, plutôt que des sonorités de la langue parlée, présente plusieurs avantages. C’est une façon de respecter la spécificité de la langue écrite, qui n’est pas une « matérialisation », disait Saussure, de la langue parlée, et mérite donc d’être étudiée en elle-même et non comme une transcription de la parole. Cette démarche permet en outre un apprentissage beaucoup plus progressif et systématique, qui ne demande rien à l’élève à quoi on ne lui ait préalablement donné les moyens de répondre, et qui par suite le rend très vite autonome dans sa confrontation au texte écrit.
2/ A l’inverse, il nous semble qu’on sous-estime ordinairement les inconvénients de l’apprentissage du code par « leçons de sons », en partant donc de la langue parlée. Cette démarche propre aux méthodes « mixtes » laisse une très large place à la reconnaissance de mots dont la forme globale doit être mémorisée et à la lecture « devinette ». On en voit les conséquences quelques années plus tard, quand nombre d’élèves s’avèrent incapables de comprendre un texte simple car ils ne prêtent pas une attention suffisante à des signes graphiques menus mais décisifs (de ponctuation, d’accents, de conjugaison, etc.).
3/ L’argument principal, à vrai dire toujours le même, employé à l’encontre de la syllabique « graphémique » est qu’elle impose un apprentissage abêtissant, coupé du sens (b-a-ba), qui condamne l’apprenti lecteur à ânonner pendant des mois et ne lui donne à déchiffrer que des textes misérables. Un certain usage de la syllabique peut effectivement aller en ce sens : en 1986, Françoise Dolto, tout en reconnaissant son efficacité, soulignait combien elle gardait un souvenir de son propre apprentissage marqué par l’ennui et le désintérêt. Mais pour notre part, nous étions bien convaincus qu’il pouvait exister une pratique intelligente de la syllabique !
Q : Je lis, j’écris, c’est donc ce que vous appelez « une pratique intelligente de la syllabique » ?
R : En tout cas, c’est bien le but que nous désirions atteindre. Le fait est que tous ceux qui découvrent Je lis, j’écris sont frappés par le refus de toute infantilisation, par l’ambition des textes et de l’iconographie. Ce qui démarque Je lis, j’écris non seulement des autres méthodes syllabiques, mais aussi des méthodes mixtes qui pratiquent les « leçons de sons ». Au point que l’on nous reproche parfois un vocabulaire trop diversifié, des textes un peu difficiles, en quelque sorte un excès de sens : ce renversement de la critique habituellement adressée à la syllabique ne manque pas de sel !
Cette ambition est très délibérée. Après tout, le meilleur de la littérature enfantine est de haute tenue intellectuelle, culturelle et esthétique. Pourquoi devrait-il être réservé à une minorité ? Nous avons cherché à tirer les textes vers l’humour et le poétique, sans les réduire à un contenu purement informatif ; à promouvoir des valeurs universalistes, antisexistes et anti-xénophobes ; et nous avons confié le graphisme à Gérard Paris-Clavel, l’auteur du fameux « Rêve générale », qui nous a fait un très beau livre en puisant dans le patrimoine artistique mondial.
Q : Cette ambition n’est-elle pas cependant trop grande pour des enfants de six ans ?
Les ressources linguistiques et l’intelligence souvent sous-estimées des élèves de CP leur permettent de conjuguer l’apprentissage du décodage, la découverte de mots nouveaux, la discussion et la compréhension de textes un peu exigeants. Loin de les rebuter, le travail de la langue et du sens les motive énormément, jouer avec la sonorité et l’étrangeté de mots peu familiers les ravit. Ils se convainquent que lire, ça vaut le coup ; et ils sont très sensibles à l’esthétique de la mise en pages et en images de Je lis, j’écris, à son côté « livre d’art ».
Nous n’oublions pas que d’après les enquêtes du ministère les écarts cognitifs et culturels selon le milieu social doublent entre l’entrée au CP et la fin du CM2 : l’ambition de Je lis, j’écris est un atout pour aider l’école à compenser le poids des inégalités sociales. Comment l’école pourrait-elle lutter contre les inégalités culturelles si elle ne propose pas des apprentissages ambitieux aux élèves qui ont le moins de ressources familiales ?
Bien qu’étant paru après la rentrée scolaire, Je lis, j’écris est utilisé dès cette année 2009/2010 dans une série de classes de CP, dont une majorité en ZEP. Avec un succès général et réjouissant, dont on trouvera le récit sur le site du manuel (qui propose également beaucoup d’indications pour le maître, des exercices, etc.).